L'histoire

Paris, février 1848:
La révolte gronde dans les rues de la capitale. Deux ans auparavant, une très mauvaise récolte, conséquence de conditions climatiques désastreuses, a entraîné une hausse dramatique du prix du pain, aliment de base de la population. S'en est suivie une crise économique historique, et en cette fin d'hiver 1848, un grand nombre de Parisiens est au chômage. La Révolution de 1789 n'est pas si loin que ça dans les mémoires, et pourtant le petit peuple a toujours l'impression d'être invisible aux yeux du Roi.
Des opposants à Louis-Philippe se rassemblent pour réclamer une réforme électorale qui donnerait plus de poids au peuple, mais une de leurs manifestations dégénère et c'est tout Paris qui se soulève, ouvriers, étudiants et bourgeois unis contre le gouvernement. Celui-ci tombe, et dans la foulée Louis-Philippe abdique. Mais personne n'est prêt à prendre le pouvoir et une République vacillante, qui ne traite que les affaires courantes et n'engage aucune réforme, remplace la Monarchie de Juillet. L'instabilité politique règne en France, les gouvernements se succèdent à toute allure. La Révolte essaime en Europe, portée par des sentiments nationaux forts. Les monarchies s'effondrent et les populations se retrouvent laissées à elles-mêmes.
Seuls deux pays résistent à cette vague, l'Angleterre et la Prusse. La Reine Victoria a en effet su conserver son trône, même si cela a été au prix de réformes profondes En Prusse, Frédéric-Guillaume IV réprime violemment les manifestations et brandit la menace de l'anarchie pour unifier les différents États allemands dans ce qu'il nomme la "Fédération Allemande". Effrayé par la situation politique du continent, il met en place une politique isolationniste extrême, refoulant aux frontières les idées comme les marchandises.

Cependant, si la situation politique est catastrophique dans l'Europe entière, les industriels profitent de l'absence de lois pour pratiquer un libéralisme forcené. Les paysans, qui peinent à survivre sur leurs terres rachetées par ces mêmes industriels, prennent le chemin des villes et des usines. En effet, grâce aux progrès de la mécanique et de la chimie, les terres donnent plus en réclamant moins de bras pour les cultiver. Peu à peu les campagnes se désertifient complètement et les terres les moins rentables ou les moins accessibles sont rendues à la nature. Les villes sont entre-temps devenues de véritables mégapoles, les usines et leurs logements formant souvent de véritables quartiers, voire des villes à part entière dont certains ouvriers ne sortent jamais.
Si la plus grande partie de la population forme une classe ouvrière toujours à la limite de la misère, la bourgeoisie, elle, a su tirer son épingle du jeu pour acquérir un poids politique important. Les femmes, particulièrement, profitent de l'occasion pour gagner en liberté et imposer la notion d'égalité entre les sexes en embrassant les métiers délaissés par leurs maris: on voit bientôt des femmes médecins, avocates, étudiantes... En contrepoint, l'Église reprend peu à peu du pouvoir qu'elle avait perdu depuis la Révolution, car les gens désemparés par l'absence d'un pouvoir politique stable se sont à nouveau tournés vers elle.

Commune de Sangatte, 1860:
Un riche industriel a l'idée de faire creuser un tunnel sous la Manche afin d'y faire passer une ligne de chemins de fer. Son but est simple: faire payer un droit de passage conséquent aux compagnies ferroviaires qui souhaitent emprunter son tunnel, et en retirer un copieux bénéfice. Les avancées technologiques des dernières années permettent l'exécution de ce projet et les ouvriers commencent rapidement à forer. Quelques semaines après le début des travaux, une formidable explosion ébranle le tunnel, tuant tous les ouvriers se trouvant dedans et même ceux à l'extérieur. La secousse provoquée par l'explosion est ressentie à des centaines de kilomètres et le bruit de l'explosion à près de cent kilomètres. Quant à son souffle, on ne peut que se féliciter que l'orientation du tunnel l'ait envoyé vers une campagne quasi-déserte.
Dans les jours qui suivent, un énorme nuage de poussière parcourt l'Europe. Peu après, on assiste à des phénomènes étranges: certaines personnes semblent soudainement dotées de pouvoirs magiques. Cela reste tout d'abord confidentiel - les superstitions et l'influence de l'Église sont encore fortes - mais quand le phénomène touche les villes et de plus en plus de monde, il devient impossible de nier l'évidence: l'explosion dans le tunnel semble bel et bien avoir réveillé la magie chez certaines personnes.
Le phénomène s'amplifie avec une deuxième explosion dans les Alpes bavaroises, dont la rumeur se répand malgré l'isolationnisme de l’Allemagne. Mais nul ne sait où ni quand précisément a eu lieu cet accident-là, on n'en voit que les résultats sous la forme de l'amplification ou de la révélation de pouvoirs magiques.
Des Universitaires de toutes les disciplines, du scientifique au théologien, s'emploient à étudier ce nouveau phénomène et à lui trouver une explication. Ils découvrent rapidement l'existence de particules inconnues jusque lors, qu'ils appellent "particulae magicae", et qui semblent être à l'origine des phénomènes magiques.
Plusieurs "écoles" de magie voient le jour, on commence même à intégrer les "particules magiques" à des objets courants pour améliorer leurs performances. (voir le topic sur la magie pour la description des différentes "écoles" de magie). L’Église se dresse contre la magie en se radicalisant et en faisant ressortir les anciennes superstitions sur les sorcières, mais elle n'a plus d'influence que sur les populations rurales, inquiètes de voir des bêtes inconnues hanter leurs campagnes vidées de leurs habitants. En ville, une nouvelle religion gagne en puissance jour après jour, principalement auprès de l'immense population ouvrière: elle donne à chacun le sentiment d'exister et valorise ceux qui sont dotés de pouvoirs magiques.

France, 1870:

Dix ans se sont écoulés depuis l'explosion dans le tunnel sous la Manche, plus de vingt depuis les Révoltes de 1848. La Fédération Allemande, toujours refermée sur elle-même, revendique l’Alsace et la Lorraine, terres historiquement germaniques selon elle. La tension entre la France et la Prusse ne cesse de croître, le gouvernement français cède aux militaires et déclare la guerre à l’Allemagne, pensant pouvoir compter sur le soutien de l'Angleterre. Or si celle-ci est théoriquement alliée de la France, elle ne souhaite en aucun cas se lancer dans une guerre.
Le conflit éclate, l'armée prussienne, mieux organisée, mieux équipée et n'hésitant pas à utiliser la magie sur les champs de bataille (l'influence de l'Église, peut-être à cause du protestantisme, a été moindre), écrase l'armée française en quelques mois à peine et s'offre même le luxe d'assiéger Paris. Le gouvernement capitule rapidement, enfin conscient qu'il n’a pas les moyens de lutter et que les Anglais ne viendront pas.
Le Traité de Versailles est signé. L'Allemagne annexe l'Alsace et une partie de la Lorraine, la France doit payer de lourdes réparations. L’Angleterre s'en inquiète et offre à la France une présence militaire: elle enverra des troupes dans certaines villes stratégiques, ainsi que dans la région de Sangatte, afin de dissuader l’Allemagne d'attaquer la nation affaiblie. Mais avant que le gouvernement ait pu répondre, un mouvement né sur la Butte Montmartre, quartier très populaire et politisé, enflamme Paris et met à bas le gouvernement.
Les Parisiens n'ont en effet pas digéré le siège de leur ville, et encore moins la capitulation rapide des gouvernants. Ils refusent le Traité de Versailles, et déclarent la Commune. Il n'y a plus aucun commandement pour contrer le mouvement, et Paris se déclare bientôt "Cité-État" et que de fait, elle n'a pas à honorer les dettes et les traités contractés par un gouvernement félon.
D'autres grandes mégapoles, comme Lille ou Lyon, se déclarent aussi Cité-États. Certaines acceptent la protection de troupes anglaises, qu'elles logent et nourrissent, mais dont la solde reste à la charge de l'Angleterre, en échange d'avantages douaniers.

Paris, 1873:
Les Parisiens se remettent peu à peu des événements de la guerre. La Commune, nom donné au régime politique qui régit la ville, est toujours en place, faisant preuve d'une stabilité inconnue depuis plus de vingt ans. Stabilité toutefois acquise au prix de réformes radicales et d'un solide appui de la police et de ce qu'il reste de l'armée. Toute opposition est sévèrement réprimée, mais la contestation est bien présente dans certaines franges de la population qui n'ont pas vu leurs espoirs se réaliser ou qui ont vu le pouvoir fondre entre leurs mains.